Le Shekhawati est situé dans une région semi-aride situé de broussailles et de ruines dans la partie Nord-Est du Rajasthan et est adossé aux derniers chaînons des monts Aravalli. Il se situe exactement dans le centre du triangle Bikaner-Jaipur-Delhi, à mi-chemin entre les terres arides du Gange et le désert du Thar. Il comprend les districts de Sikar et Jhunjhunu. Cette contrée où tout à la couleur du sable est moins touchée par le progrès que d’autres régions du Rajasthan. On y retrouve plus l’Inde rurale : carrioles tirées par des dromadaires ou des ânes que des véhicules motorisés. On y retrouve également peu d’arbres mais tout de même de nombreuses cultures de millet, d’orge, de lentilles, d’arachides, de moutarde et de sésame … Les villes sont plus petites que les autres de l’Inde (maximum 60.000 habitants pour les plus grandes).
La région du Shekhavati (littéralement “la province du Shekha”) faisait à l’origine partie du royaume d’Amber. Son fondateur, Rao Shekha (1433-1488, né après le désespoir de son père de ne pas avoir de fils, fît un pélerinage à Mathura où un sadhu lui promit un fils si dès rentré chez lui, il recueille et protège les vaches si chères à Krishna et il eut Rao Shekna). Rao Shekha en fit un Etat indépendant qui se maintint jusqu’en 1738, date à laquelle, le Shekhawati retourna à Jaipur. Ses descendants gouvernèrent leurs petits royaumes en tant que vassaux du Maharaja de Jaipur jusqu’après l’Indépendance.
Cette région a connu un essor touristique pour ses magnifiques havelis après les années 1980, dont la région possède d’après certains chiffres environs 70 villes ou villages où s’y trouvent ces magnifiques demeures. Les havelis sont des maisons richement décorées de fresques dites naïves dans le langage de la peinture qui apportent de la couleur dans ce paysage monochrome.
Le Shekhavati, situé aux portes du désert du Thar, carrefour de l’Inde, du Moyen-Orient et de la Chine, donc bien situé, permit à ses marchands “les baniya” de faire fortune dans le commerce caravanier des épices, sucre, opium, soie, laine, pierres précieuses …
A partir de la fin du 19ème siècle, l’influence croissante de la Compagnie des Indes orientales transforma leurs activités, délaissant le commerce itinérant et les “baniya” se déplacèrent vers d’autres grandes cités prospère comme Bombay, Delhi et Calcutta (où ces hommes changèrent de surnom et deviendront à tort les marwaris, par référence au Marwar royaume de Jodhpur). Dans ces villes, ils se mirent au service des entreprises coloniales.
Aujourd’hui, les grands acteurs de plus de la moitié du capital du secteur moderne de l’économie indienne est contrôlée par des castes de commerçants originaires du Shekhawati. D’autres, ont rejoint les pays du Golfe sur certains gigantesques chantiers et l’argent envoyé permit à leur famille de construire de grandes demeures spacieuses avec un très bon confort.
Haveli signifie : HA = air – VELI = vallée. Ce sont les marwaris et non les chefs rajputs qui donnèrent au Shekhawati sa notoriété. Ils utilisèrent leurs énormes bénéfices pour édifier sur leur terre d’origine des havelis magnifiquement peintes, ordonnées autour de plusieurs cours (chows) mais également de nombreux temples et des puits (baoli) puits à degrés (ci-après).
Certaines havelis ont plus de 200 ans. Les havelis sont à l’origine de riches demeures construites par les Marwaris et chacun voulait montrer sa prospérité, impressionner l’entourage et pour compenser leurs longues absences en construisant ces maisons. Quand ils les ont abandonné, ils les ont laissé à des gardiens “les chowkidar” qui vivent souvent dans la première cour. Les havelis ont souvent 5 étages et sont constituées d’une première cour où était accueillie les hôtes et la deuxième cour était la cour privée.
La couleur original des motifs des havelis sont constitués à l’origine de couleurs naturelles mais à partir de 1880 environ, les peintres ont commencé à utilisé des pigments chimiques venus d’Allemagne, ceux qui ne rends bien évidement pas le même cachet d’origine. C’est peut-être la région où il y a la plus grande concentration de peintures murales au monde. Le soleil, la mousson, les vents de sable ont fait pâlir l’éclat original des façades. Sans oublier, les tags, les affiches publicitaires, la chaux tandis qu’à l’intérieur les fresques ont été noircies par la fumée des fourneaux, des lampes à pétrole et l’humidité.
Les artistes anonymes ayant peint les havelis semblent avoir eut horreur du vide et peignèrent jusque dans chaque recoins, chaque centimètre carré des murs et égayés de fresques. Façades extérieures, murs des cours intérieures, salles de réceptions ou simples passages, rien ne leur échappa. Ils peignèrent l’histoire de la famille et leurs richesses, les scènes de vie, les nouvelles technologies (chemin de fer, automobiles, machines à coudre, phonographes, européens …) et surtout des illustrations de la mythologie hindoue (Trinité, histoires des dieux et déesses, Rāmāyaṇa, …) qui permettait en même temps d’instruire les habitants des havelis. Une haveli est en sorte un grand livre d’image.
Les peintres pouvaient également être les bâtisseurs des havelis, appartenant à la caste des kumhar (potiers). On faisait souvent venir ces chajera (maçons) d’autres régions, notamment de Jaipur, où ils avaient décoré les palais de la nouvelle capitale, mais certains venaient eux-mêmes proposer leurs talents au Shekhawati. Il en découla un échange productif d’idées et de techniques, les artistes locaux se formant auprès de ces nouveaux arrivants.